Stéphane Decotterd : l’unique chef étoilé de la Riviera vaudoise ne travaille que les produits suisses

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Le restaurant gastronomique tenus par Stéphane Décotterd à Glion offrent une vue panoramique exceptionnelle sur la Riviera vaudoise. Les neiges tombées mi-mars sur les reliefs ainsi que la chape de nuages au-dessus du lac Léman n’enlèvent rien à ce lieu.

Depuis septembre 2021, le chef, originaire de la région, et sa femme, gèrent cet établissement haut-de-gamme, ainsi qu’un bistrot, un espace bar et lounge, au sein de l’école hôtelière de Glion (Glion Institute of Higher Education).

Avec le récent départ à la retraite de Denis Martin, le virtuose de la cuisine devient le seul chef étoilé dans la ville de Montreux et aux alentours.

Interview à Glion.

Stéphane Décotterd : “Je suis au service des producteurs et de la nature”

Pour ceux qui ne vous connaissent pas, pouvez-vous vous présenter svp?

J’ai travaillé durant 10 ans au Pont de Brent, aux côtés du chef Gérard Rabaey, 3 étoiles au guide Michelin. C’est là que j’ai rencontré mon épouse Stéphanie. Elle y était sommelière.
On a repris la maison de 2011 à 2021. Nous avons obtenu 2 étoiles dès la première année. On avait une carte classique, avec du homard, du foie gras, etc.

Puis, un jour, j’ai eu un déclic : j’ai eu envie de faire ma propre cuisine avec des produits qui correspondent à l’endroit dans lequel on est.
C’est ainsi qu’en 2018, j’ai arrêté tous les produits de la mer et les produits exotiques pour réaliser une cuisine locale, avec des produits suisses exclusivement.

En septembre 2021, nous avons ouvert la Maison Décotterd, dans les murs de l’école hôtelière de Glion. Nous exploitons un restaurant gastronomique, une brasserie, un bar et un lounge bar au sein de la Maison Décotterd.

Depuis ces tables du restaurant gastronomique de la Maison Décotterd, la vue est vertigineuse.

Le chef Denis Martin, précurseur de la cuisine moléculaire, a réalisé son dernier service le 24 mars dernier. Comment réagissez-vous à cet événement?

J’ai beaucoup d’admiration pour Denis Martin car, même à l’âge de la retraite, il a toujours eu la flamme pour ce métier.
C’est un créatif qui a osé prendre des risques dans sa carrière avec la cuisine moléculaire. Il a su garder sa ligne, son style singulier contre vents et marées. Je suis très admiratif.

Je pense que la cuisine moléculaire, malgré le fait qu’elle a été décriée au départ, est dans toutes les cuisines aujourd’hui. Par exemple avec l’agar-agar, que peu de personnes n’utilisait avant l’arrivée de la cuisine moléculaire. Denis Martin a inspiré toute une génération de cuisiniers et ses techniques continuent de vivre.

Stéphane Décotterd, vous êtes désormais le seul restaurateur étoilé de la Riviera vaudoise. Est-ce la fin d’une époque selon vous?

Il y a une quinzaine d’années, il y avait beaucoup de chefs reconnus comme Denis Martin, aussi au sein du Grand Hôtel du lac, des Trois Couronnes, de l’Ermitage ou du Montagne.

En effet, beaucoup d’établissements ferment. Il n’y a pas qu’une seule raison selon moi.
A cause de la conjoncture économique d’une part, mais aussi du Covid. Ce dernier a provoqué un changement d’habitude profond. On préfère manger une salade au bord du lac plutôt que d’aller manger un plat du jour dans un restaurant.

Quand j’ai commencé, dans les années 2000, les habitudes de consommation étaient différentes. Les gens boivent moins d’alcool aujourd’hui. Les repas d’affaires qui finissent avec cigares et digestifs, c’est fini! La sobriété est un gage de sérieux désormais.

Toutefois, Montreux reste très attractif. On observe un fort esprit entrepreneurial. La rénovation du 2m2c est un exemple de ce nouvel élan.

Vous avez fait le choix d’exclure les produits d’importation en 2018. Comment se traduit cet engagement dans votre quotidien?

Avant cette décision, j’appelais le grossiste et je commandais tels ou tels produits pour la saison. Aujourd’hui, je suis au service des producteurs et de la nature. Je demande au pêcheur quand il aura des écrevisses et je travaille le produit uniquement lorsqu’il est disponible.

Je suis acteur d’un cercle vertueux dans lequel c’est à moi de m’adapter. C’est un univers de travail très sain et qui a du sens d’un point de vue éthique.
C’est aussi grâce à cette approche que j’ai découvert des herbes sauvages que je ne connaissais pas malgré 25 ans en cuisine.

La cueilleuse avec qui je travaille m’a fait entrer dans un nouvel univers. C’est alors un apprentissage qui a démarré afin de comprendre et d’apprivoiser ces produits. Dans le processus de création, c’est ça qui dicte les plats que l’on réalise.

 

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